Ecstatica

 

 

Ecstatica prend place en l'an 928, dans le nord de l'Europe. Un jeune aventurier (voir une jeune aventurière) se retrouve à court d'eau lors de son voyage et décide de faire une halte au village de Tirich. Une fois à l'entrée du village, le lieu semble avoir été abandonné. Au fur et à mesure, on apprend qu'une jeune sorcière, Ecstatica, a invoqué sans le vouloir une horde de monstres, qui ont ravagé le village et massacré ses habitants ; elle est maintenue dans un profond sommeil au fond d'un donjon. Le joueur va devoir aller la libérer afin de mettre fin à ce carnage.

    

  

Il va falloir d'abord parler de "l'éléphant" dans la pièce, oui, Ecstatica à une esthétique visuelle assez particulière. Le jeu utilise une technique de rendue par "ellipsoïde". Pour vulgariser (très grossièrement, et limité au domaine du rendu graphique en temps réel, car le concept de l'ellipsoïde provient avant tout du domaine de la géométrie euclidienne, merci Wikipedia), on construit les modèles 3D avec des formes sphéroïdes (d'où cet aspect "ballon de baudruche") qu'on place sur un maillage 3D.  C'est évidemment bien plus compliqué que ça, de plus il me semble avoir lu (méfiance donc) que le moteur d'Ecstatica ne calcule pas vraiment les modèles sphériques en 3D mais serait en fait une approximation en 2D. Bref, le fait est que le rendu graphique du jeu n'est pas forcément le plus approprié pour un jeu de type survival-horror.

Dès qu'on arrive dans le village, on a cette impression de vide, le tout est accompagné par l'excellente bande-son de Phil Morris (la musique du jeu est très menaçante, elle participe grandement à l'ambiance du titre). L'espace de jeu est assez ouvert, on a déjà l'entièreté du village de Tirich ainsi que les bois alentour à explorer. Plusieurs choix s'offrent à vous : une grange, une église, une maison ; à la manière de Alone in the Dark et plus tard Resident Evil, et d'autres zones comme le donjon, ou la tour du château. Vous devrez trouver des objets importants, résoudre des énigmes, et affronter des ennemis. Vous avez déjà une certaine liberté de déplacement, peut-être trop pour certains, mais Ecstatica n'est pas tellement dur, il peut quand même s'avérer assez cryptique à certains moments, l'utilisation d'un guide est donc recommandée pour certains passages.

Le bestiaire du jeu est peuplé de créatures issues de différentes mythologies européennes, notamment celtique, scandinave et gréco-romaine (voire simplement issues des livres d'Heroic Fantasy de l'époque). Ainsi on retrouve des Trolls, des Dragons, Loups-Garous, Minotaures, et autres Mort-Vivants. Le jeu s'offre même un proto-Nemesis avec le Loup Garou, qui sert souvent de "mascote" du jeu, tant dans les artworks promotionnels, y compris sur la boîte du jeu, que pour les joueurs pour qui il sera en général le premier ennemi. Très vite on comprend qu'il s'agit d'un adversaire invincible. De temps en temps, il décidera de poursuivre le joueur à travers le village. Il peut être repoussé pour quelques minutes si le joueur décide d'en découdre avec lui, là et après avoir pris 5 ou 6 coups d'affilée, il s'éloignera pour quelque temps.

    

  

Le système de combat se fait en corps à corps, le jeu se passant au Moyen Âge. Et pour le coup, on a là une vraie distanciation avec la majorité des jeux de type survival-horror, pas de munitions à gérer, et des combats à base de coups d'esquives. Le seul autre jeu auquel je pourrais penser serait Onimusha de Capcom qui, lui, prend place dans un Japon féodal. Même la suite, Ecstatica II, rendra le système de combat bien plus nerveux (j'exclus évidemment les action horror tels que Ronin Blade ou Nightmare Creatures qui possèdent un gameplay plus vif que ces deux titres).

On retrouve cependant quelques limitations propres aux survival-horror :

- L'inventaire est très limité, c'est simple : on n'a que deux emplacements à notre disposition, à savoir nos deux mains, en plus de cela il faudra aussi souvent porter une arme afin d'être préparé à faire face à d'éventuels ennemis (bien qu'il soit possible de se battre à mains nues, voire avec un objet aléatoire). Donc, en règle générale, vous n'aurez qu'un seul emplacement libre. Ceci dit, c'est beaucoup moins embêtant que ça ne le parait : les zones de jeu ne chargent pas, donc pas besoin de s'arrêter toutes les 3 minutes, il n'y a que trois énigmes à base de collecte/assemblage d'objets, on peut poser n'importe quel item à n'importe quel endroit.

- Une autre particularité qu'on retrouve dans de nombreux survival-horror de l'époque est le fameux "tank controls". Pour le coup on utilise le pavé numérique afin de se déplacer, mais aussi pour prendre des objets, attaquer ou parer, ce n’est pas le système le plus pratique au monde. Enfin les décors du jeu sont en 3D pré-rendue, à la manière d'un Resident Evil.

    

  

On peut aussi aborder l'ambiance si particulière du titre. Peut-être à cause de l'aspect graphique, Ecstatica ajoute des éléments comiques et/ou macabres à ses situations et ses décors. On a rarement vu des survival-horror incorporant de l'humour, à l'exception peut-être de titres comme Gregory Horror Show ou certains titres de Climax Graphics comme par exemple Blue Stinger et Illbleed. Dans Ecstatica, on peut vraiment ressentir le côté cartoon de certaines situations, le héros trébuche sur des rochers, se cogne contre les murs, fait une sieste au milieu du carnage, etc... Et les autres personnages ne sont pas en reste : le prêtre vous prend pour un démon, le vieux sorcier a des trous de mémoire, le seul chevalier du village est un pleutre, et une petite fille à forte tête martyrise le loup-garou qui pose tant de problèmes au joueur.

Mais en dépit de cet aspect jovial, le jeu peut aussi se révéler TRES violent, bien plus qu'aucun autre survival-horror de son époque, certes le tout est atténué par le style graphique du titre et par l'humour noir et l'aspect déjà un peu déjanté. Dans Ecstatica, on peut retrouver le cadavre lacéré et pendu d'un moine, un des villageois est crucifié à la lisière du bois, une jeune femme est empalée sur une table dans l'une des maisons. Et vers la fin du jeu, quand on a enfin accédé au donjon, on peut y voir des cadavres empalés verticalement sur des lances.

    

  

C'est tout ça qui a contribué à faire de Ecstatica un jeu culte aujourd'hui : les innovations techniques, le gameplay très permissif pour l'époque, l'ambiance si étrange, et ce côté assez trash dans certaines situations. Je ne peux que recommander ce titre, surtout pour ceux qui s'intéressent à l'histoire du survival-horror, de plus le jeu est assez facile à se procurer. Pour cela vous avez deux options : une version sous DOS, sur Abandonware France par exemple, sinon une version sous Windows existe aussi, avec quelques avantages (meilleure résolution, meilleur son, nouveaux décors pré-rendus de meilleure qualité) mais aussi quelques bugs par rapport à la version DOS. Les deux versions sont bien sûr gratuites.

Je vous conseille aussi "Les Jeux du Passé" une chronique de jeu-vidéo sur internet qui a consacré un épisode à Ecstatica. Le narrateur revient notamment sur la genèse du jeu, très bon travail.


Description du jeu par RTOxx23

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